Des IVG instrumentales réalisées par des sages-femmes

Le CH de Troyes (CHT) fait partie des 27 établissements retenus par le Ministère de la Santé et de la Prévention pour intégrer une expérimentation nationale permettant la réalisation d’Interruption Volontaire de Grossesse (IVG) instrumentale en établissements de santé par les sages-femmes. Une offre de soins renforcée pour les patientes et des compétences reconnues pour les sagesfemmes. Et un projet qui fait sens, à l’hôpital des Hauts-Clos devenu « Simone Veil » en 2018.

Le contexte

Depuis 2016, le champ de compétences des sages-femmes permet la réalisation d’IVG médicamenteuse. La loi de financement de la sécurité sociale pour 2021 fixe le cadre de l’expérimentation IVG instrumentale réalisée par les sages-femmes. Elle prévoit que les sages-femmes justifiant d’une expérience et ayant réalisé la formation complémentaire obligatoire puissent réaliser les IVG instrumentales en établissement de santé. La loi du 2 mars 2022 vise à renforcer le droit à l’avortement en augmentant le délai légal à l’IVG de 14 SA à 16 SA et la pratique de l’IVG instrumentale par les sages-femmes en établissement de santé. Objectifs : soutenir le droit à l’avortement et faciliter concrètement l’accès des femmes à l’IVG, quels que soient leur lieu de domicile et leur situation. Cela élargit également le nombre de professionnels susceptibles d’intervenir. Dans les faits, selon la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques (DREES), l’accès à l’IVG en France demeure inégal selon le profil, le lieu de résidence et le niveau social des femmes.

Le Centre d’Orthogénie

Depuis 2017, les sages-femmes du Centre d’Orthogénie du CHT assurent la totalité des consultations pré et post IVG (échographie, éducation à la contraception et santé sexuelle, repérage des violences) et prise en soins des IVG médicamenteuses hospitalisées. Par ailleurs, le CHT accompagne tous les ans les praticiens libéraux (médecins généralistes, sages-femmes libérales, etc.) désireux d’accompagner les femmes dans cette prise en soins en signant des conventions IVG médicamenteuses avec l’établissement de recours, en réalisant des journées d’immersion au sein du Centre d’Orthogénie.

L’engagement des professionnels

Le CHT a rejoint l’expérimentation nationale grâce à la mobilisation de deux sages-femmes (Carine GEHIN et Claire WOLKER-JARFAUT), qui ont exprimé leur souhait de faire évoluer les pratiques. Soutenues par trois gynécologues-obstétriciens dont le Dr Amjad KATTINI, chef de service, l’équipe d’encadrement et la Direction des Affaires Médicales, les sages-femmes ont déposé leur dossier en avril 2022 auprès de l’Agence Régionale de Santé et de la Direction Générale de l’Offre de Soins.

L’expérimentation

Prévue de janvier à décembre 2023, elle comprend :

  • 30 observations IVG instrumentales ;
  • 30 pratiques d’IVG instrumentales ;
  • La participation des professionnels à la formation REVHO*.

*Le Réseau Entre la Ville et l’Hôpital pour l’Orthogénie est un réseau de santé régional dont l’objectif principal est de faciliter l’accès à l’IVG médicamenteuse avec médecin ou sage-femme de ville, c’est-à-dire à l’avortement en dehors d’un établissement de santé.

Cette expérimentation est une étape préalable à la généralisation de cette pratique dans l’ensemble des établissements de santé souhaitant s’engager dans la démarche, en application de la loi du 2 mars 2022 visant à renforcer l’accès à l’avortement.

À terme, cela permettrait d’élargir l’offre de soins sur le territoire pour les patientes en demande d’IVG, et d’étoffer le nombre des professionnels pratiquant l’IVG instrumentale notamment jusqu’à la limite légale de 16 SA. Autre perspective de développement : l’IVG instrumentale pourrait être réalisée sous anesthésie locale, hors bloc opératoire.

En quelques chiffres

  • En 2021, 653 IVG ont été réalisées, dont 428 médicamenteuses et 225 chirurgicales, soit 65% par méthode médicamenteuse et 35% par méthode chirurgicale.
  • En 2021, les 5 sages-femmes orthogénistes ont réalisé 756 consultations pré et 564 consultations post-IVG.

La clause de conscience

La clause de conscience IVG consacrée par la loi Veil de 1975 puis insérée dans le Code de la santé publique prévoit qu’un « médecin ou une sage-femme n’est jamais tenu de pratiquer une interruption volontaire de grossesse », ni d’y concourir. Un médecin qui invoque sa clause de conscience n’a pas à se justifier. En revanche, il doit informer sans aucun délai la patiente et a l’obligation de l’orienter vers un autre praticien acceptant de pratiquer les avortements.